La Table de Mus… précipitez-vous, car les places sont courues et son talent galope vers les étoiles !

Il y a des établissements qui sortent du lot par leur lieu, leur bâtiment particulièrement riche, un classicisme parfait, une déco extraordinaire ou encore une belle réputation. La Table de Mus ferait plutôt partie des trublions de la gastronomie et à Coming Chic, on adore ça ! Nous vous emmenons en quelques images et deux ou trois mots, dans l’univers (ou plutôt le concept, comme il aime à le rappeler) d’un jeune restaurateur un peu fou, très talentueux, innovateur et qui n’a pas peur de faire du hors piste. Cela donne une table ébouriffante et une soirée gourmande à tous points de vue, du plaisir de se retrouver dans le centre historique de Bruxelles jusqu’à celui de quitter la table repus et intérieurement heureux.

Cela ne s’appelle pas la Table de Mus pour rien… Mus est partout dès la première seconde, portant avec un bonheur manifeste et élégance son concept qui va jusqu’au gant noir, porté à la main droite par le personnel et lui, of course. Il est dynamique, galope de table en table, veille à tout du coin de l’œil et au début cela surprend. Quelques minutes après, on l’adopte définitivement, quand on constate qu’il va passer la soirée à tout rendre le plus parfait possible. Il faut accepter l’absence de carte, les produits qu’il a choisi pour la semaine et surtout… il faut lui faire confiance pour vous materner du premier au dernier service et c’est un régal de se laisser bercer, conseiller, guider, de l’assiette au vin qui l’accompagnera. Aux petites mises en bouche on se dit que c’est bien, mais on ne s’attend pas au feu d’artifice qui va suivre. Si j’avais, très modestement, un tout petit conseil à lui donner (et je l’ai fait de vive voix) ce serait de rendre ces bouchées aussi magiques que ce qui les suit. Mais attention, c’est là que le voyage commence et ça nous emmène très haut dans la galaxie des saveurs et accords inattendus !  Suivez-nous…

Des mises en bouche élégantes et simples.

Pour nous mettre en appétit, Mus nous sert d’abord un très pétillant Vouvray brut (Domaine Boutet Saulnier – Val de Loire). Il est frais, guilleret et se trouve vite rejoint par trois jolies bouchées. Il y a là un petit sablé au parmesan farci d’une mousse de fromage blanc et saumon fumé, une galette moelleuse à la purée de pois chiches, curry et huile de truffe. Nous avons aussi un velouté de pomme de terre à l’ail, accompagné d’un crumble d’oignons et de fines lamelles de saucisson fumé. C’est bon et raffiné, mais cela ne présage pas réellement des incroyables saveurs que nous découvrirons par la suite.

Une première entrée qui fait décoller illico notre fusée de goûts…

Et là… c’est le décollage pour des confins inconnus, dès la première entrée ! Ce n’est plus un secret pour vous, je suis dingo du canard et là, je vais me retrouver les jambes coupées et les papilles en extase. On vient de nous servir une secouant Carpaccio de Canard, crème raifort, chips de topinambour et fraîcheur d’herbes ! Comment vous dire… c’est explosif et ça nous renverse comme un crème. Je regarde Serge et au même moment nous prenons une première bouchée. Nous devions ressembler aux Dupont et Dupond, car si surpris que nous en sommes presque restés bouche bée ! C’est incroyablement fin et frais… on dirait que les herbes viennent d’être coupées au jardin et l’aérienne crème au raifort (subtilement cachée sous les fines tranches de viande crue et qui ne manque à aucune des bouchées) vient réveiller tout cela au cas, très peu probable, où une seule papille aurait eu l’indécence de s’assoupir. Les chips de topinambour sont un bonheur… ça croustille et on y retrouve ce délicat goût d’artichaut que j’apprécie tant. Cette entrée est réellement surprenante et, sans flagornerie aucune, c’est une extraordinaire combinaison de saveurs, que Mus accompagne d’un très intelligent Val de Loire, Les Caillasses 2015 de la maison Franck Breton.

Seconde entrée… second étage de la fusée, l’ascension continue !

C’est un excellent vin blanc italien (Terre di Chieti, de l’appellation Pecorino) qui vient le remplacer pour la seconde entrée et nous nous demandons si ça va monter encore plus haut dans les surprises… nous n’allons pas être déçus ! Pour revenir un instant à ce beau vin (qui a failli disparaître au siècle dernier), je lui trouve un nez très fruité avec un peu de miel et une attaque fraîche. Plus loin en bouche on retrouve une douceur qui va se marier parfaitement avec ce qu’il accompagne. Et c’est… un duo de Noix de Saint-Jacques rôties, chou blanc « choucroute », texture acidulée de chou rouge et sauce moutarde à l’ancienne. C’est hautement improbable et ça fonctionne à merveille ! Les Saint-Jacques sont impeccables, bien rôties, au cœur nacré et le plus surprenant est sans doute son lit de chou façon choucroute. En bouche c’est provocateur et perturbant, c’est bon dans l’instant, mais on doute quand même mentalement… dès qu’on laisse la parole au seul plaisir, il se manifeste activement et c’est un délice. On n’a donc qu’une envie : goûter à l’autre association (tout aussi improbable) et conserver un joli morceau de noix de Saint-Jacques, pour le déguster avec le chou rouge en texture… ça matche de la même manière surprenante et j’y retrouve même les saveurs du chou rouge dominical aux pommes de mon grand-père ! Une bouffée de nostalgie me monte au cœur et c’est tout simplement une entrée parfaite aux accents de plaisir très prononcés. La sauce moutarde à l’ancienne, corsée et généreuse en grains, apporte du pep’s et lie le tout avec subtilité mais caractère, tandis que cette seconde entrée est aussi graphique et élégante que la première.

Le plat principal nous projette en orbite.

Nous nous demandons vers quels univers va nous emmener le plat principal et nous aurons rapidement la réponse. C’est un Skrei (une des 356 manières élégantes de rebaptiser le cabillaud) en deux façons, crème de Vitelotte, salicorne et réduction au lait de coco et soja. Le dos du poisson, cuit doucement, est parfaitement réussi et se détache d’un simple regard, il fond littéralement en bouche. La chair se cache aussi dans une élégante pomme Dauphine, très réussie et savoureuse. La crème de Vitelotte est légère et douce, ce qui s’allie parfaitement à la réduction de coco et soja, c’est intelligent ! Quant à la salicorne, elle apporte la touche d’iode que j’apprécie tant chez elle et je n’en avais jamais vu de si fine. Une fois de plus, l’ensemble de la recette est d’un superbe équilibre et d’une modernité déroutante chez un créateur de goûts aussi jeune que Mus. Nous avons Serge et moi deux vins différents. Un très joli Beaujolais Primeur pour moi, à la robe presque rose et d’une jeunesse fort plaisante et rafraîchissante. La région de Fleurie produit souvent de très belles surprises… Le second est un Bourgogne blanc 2011 Château des Jacques, parfait.

Le dessert nous envoie définitivement en apesanteur !

C’est en apothéose que Mus nous présente son dessert, qui va marquer de manière explosive la fin de ce dîner. Il décide de le souligner par un Rosé Pétillant, un très sympathique Manganèse Méthode Aromatique, signé Richard Rottiers. Nous sommes à Bruxelles et à quelques décamètres du musée du chocolat… c’est donc agréable de retrouver dans notre assiette une parfaite sphère de ce trésor quasi culturel belge ! Mais le vrai bijou se cache à l’intérieur et un second va se couler voluptueusement et chaudement sur le chocolat noir… C’est un onctueux coulis de caramel laitier « Choco Mus » chaud et incroyablement parfumé, qui fait fondre une partie de la sphère. A l’intérieur, nous découvrons de la poire pochée à la vanille, légèrement ferme pour rappeler qu’elle est fraîche. Elle n’attend que nous sous une aérienne mousse de chocolat blanc. C’est tout simplement l’extase !

Nous avons quitté Mus et sa table conquis par le talent et la fougue de ce jeune dingue de cuisine et entrepreneur à la fois. Nous vous conseillons vivement d’aller passer une soirée chez lui et de vous laisser guider par ses inspirations, vous ne le regretterez pas ! Une première étoile nous semble clairement destinée à tomber sur sa table dans un délai fort proche. Maîtrise, créativité et audace… souvent ça paie ! Et à ce propos, notre dîner décoiffant revient à 63 € par personne (90 € vins compris) … le midi le lunch est très couru et nous savons désormais pourquoi. Une table à découvrir d’urgence, avant qu’il ne soit obligatoire de réserver un mois à l’avance, ce qui ne saurait tarder !

Notation : 5 Marcus
(1 = moyen – 2 = correct – 3 = Table de qualité – 4 = table de grande qualité – 5 = Table d’exception).

Site officiel : www.latabledemus.be

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