Les restaurants argentins ne sont pas légion à Bruxelles et on peut dire que si vous désirez faire un vol direct vers Buenos Aires sans prendre l’avion, il n’y a qu’un seul chemin à suivre et il mène à la chaussée de Waterloo ! L’endroit n’a pas vendu son âme et on dirait un véritable petit bout d’Argentine posé au cœur de la capitale européenne, qui ne manque pas de trésors gastronomiques et restaurants du monde entier. En voici encore un parfait exemple et vous y passerez une soirée chaleureuse, goûteuse et amicale. De la table à la salle, en passant par les vins, le patron et un serveur passionné… tout ici est authentique, je veux dire par là sans artifices ni fanfaronnades. Il n’y a pas de secret : des produits de qualité, une gentillesse non feinte, des compétences, le tout mâtiné de tango en musique de fond et de rires… tout cela fait un endroit où on ne regrettera pas de s’être arrêté !
L’argentine dans l’assiette, les verres et l’esprit… avec une pointe de Chili quand même.
En arrivant le soir et sous la pluie, nous repérons facilement le Nueva Buenos Aires parce que c’est une oasis de chaleur et de lumières, dans une chaussée de Waterloo toujours tristoune une fois le soleil couché. Des bougies, de la buée sur les vitres et des rires qu’on devine depuis l’extérieur… ça ne nous a donné qu’une envie : celle de pousser la porte et d’entrer. Plus tard, une fois que nous en sommes partis après une soirée plus qu’agréable, le désir d’y retourner nous a saisi, sans vouloir flatter le propriétaire Léonardo ni l’attachant serveur Carlos. Nous avons un regret néanmoins, celui de ne pas avoir rencontré la maîtresse des lieux… ce sera pour la prochaine fois. En tout cas, autant Miguel que moi, avons passé une soirée particulièrement agréable et pleine de saveurs nouvelles. Viandes et vins argentins n’ont pas volé leur réputation et la chaleureuse gentillesse sud-américaine n’est pas une vue de l’esprit, non plus ! Retour sur une soirée savoureuse et souriante…
Parlons boissons d’emblée, comme ça ce sera fait…
La crainte, quand on découvre la gastronomie d’un pays qui produit des vins réputés (mais qu’on ne maîtrise pas), est évidemment de faire fausse route au moment du choix. Ici, nul besoin de s’inquiéter, parce que Carlos est un as en la matière. Il connaît sa carte sur le bout des doigts et elle est principalement composée de vins argentins et chiliens, ce que j’ai fortement apprécié. Quand on ouvre un établissement à l’identité géographiquement très marquée, le bon choix est de ne pas proposer une carte de classiques français et de rester fidèle à ses racines, surtout quand le pays produit de bonnes choses. Pas de Bordeaux ici, mais que des vins sud-américains, choisis en fonction d’une carte variée, qui n’est pas kilométrique non plus (ce qui est rassurant quant à la fraîcheur des produits). Si c’est Léonardo qui vous accueille avec chaleur, un grand sourire et un accent à faire se pâmer toutes les dames sensibles au charme latin, il vous confie à la science de Carlos pour le choix des boissons. Et on le comprend, parce que le bougre concocte lui-même les pousse-cafés et maîtrise à la perfection les vins ! Il vous demande quel sont les caractéristiques qui vous attirent et vous dirige ensuite. Autant pour le blanc que pour le rouge, nous n’avons pas été déçus et les deux correspondaient à nos attentes. Nous parlons d’un Clos Perdiz – Valle Central – 2016 (Chardonnay Viognier blanc à 26 €) et d’un Carmenère – Legado – De Martino – Valle Maipo 2015 (Cabernet Sauvignon rouge à 29 €). Comme pour faire un clin d’œil à son propre pays, les deux étaient chiliens et manifestement ça ne pose aucun problème au patron, qui a totale confiance en son serveur. Et puis, chiliens et argentins s’entendent ici à la perfection… on n’est pas au foot. Mais, comme tout bon dîner commence par un apéritif digne de ce nom, Carlos nous a proposé et concocté un cocktail surprenant et savoureux. Un Pisco Sour (10 €) … autrement dit une tuerie. C’est un savoureux mélange de Pisco (eau de vie principalement produite au Chili, à base de raisins distillés et mise en fut de chêne), jus de citron vert frais, sirop de canne et… blanc d’œuf battu en neige ! Une délicieuse et onctueuse découverte pour nos papilles, vierges de ces saveurs. Attention : on en boirait volontiers cinq d’affilée, mais je ne suis pas certain qu’on trouverait le chemin de la sortie… En tout cas, c’était un parfait début pour cette soirée sud-américaine, au même titre que des exceptionnelles olives noires, assaisonnées par le chef et parmi les meilleures que j’aie mangé !
Nous avons choisi des entrées aussi différentes que savoureuses.
Dans un restaurant argentin, il n’était évidemment pas question pour moi de m’abstenir de me délecter d’un « ceviche ». J’ai donc choisi le plus complexe, qui m’attirait terriblement : ceviche de cabillaud, langostinos y salmon ahumado (13,80 €). C’est une superbe préparation froide de cabillaud, langoustines sauvages d’Argentine, jus de citron vert, saumon fumé, gingembre, oignons rouges, céleri, piment d’Espelette, mangue et coriandre fraîche. Des jolies tranches d’avocat parfaitement mûr et deux jolis tronçons fondants de patate douce, complétaient cet ensemble d’une fraîcheur à faire pâlir toutes les salades du monde. Jus, fruits, poissons, langoustines… l’équilibre était parfait et j’avoue que cette assiette a pris place dans mon top dix d’entrées froides, sans aucun complexe !
De son côté, Miguel a choisi une entrée chaude et la jolie cocotte qu’on lui a servie sur une élégante ardoise était aussi savoureuse que copieuse. Il avait donc jeté son dévolu sur le Saltado de Lomo Argentino Criollo (17,80 €). Voilà une entrée chaude accompagné de tranches de pain légèrement croustillantes, épaisses et huilées, pleines de saveur. Elle se compose de petites languettes de filet pur de bœuf argentin, mariné au jus de citron vert. La viande est ensuite sautée au gingembre, avec de la coriandre, de l’oignon rouge, du poivron rouge et des dés de tomate fraîche. C’est un peu relevé, mais vraiment sans excès et c’est très parfumé, grâce à la coriandre fraîche qui apporte une signature assez marquée à la préparation. La viande n’est pas trop cuite et conserve donc sa tendreté. Il faut signaler la grande qualité de la viande de bœuf, venant tout droit d’Argentine et dont nous goûterons d’autres déclinaisons, plus épurées. C’est juste un bonheur…
Le bœuf argentin en star incontestée à notre table…
Il était totalement impossible de ne pas répondre à l’appel de ce filet pur de bœuf argentin et c’est moi qui ai jeté sur lui mon dévolu. Il faut dire que je n’avais pas envisagé une seconde de choisir autre chose, tant la réputation qu’on fait à cette bébête d’exception est forte et connue dans le monde entier. Pourtant, du bon bœuf, j’en ai gouté… du Kobe de la race japonaise Tajima, du blanc bleu belge ou de l’exceptionnel bœuf de Bazas (Gironde), quand je vivais à quelques dizaines de kilomètres de Bordeaux. Au Nueva Buenos Aires, on vous sert un filet pur de 250 grammes (32,80 €), ce qui convient très bien à mon appétit. Avant d’amener votre viande, on vous apporte d’immenses couteaux à steak… très impressionnants. Pourtant, on n’en aurait presque pas besoin, tant elle est tendre ! Sans mentir, j’aurais pu la couper à l’aide d’une cuiller… la cuisson était impeccable et ce n’est pourtant pas facile de réussir à sortir une pièce de bœuf épaisse « bleu chaud ». Tendre comme du beurre, la viande est accompagnée de quelques légumes et les asperges auraient mérité une bonne minute de cuisson supplémentaire, mais c’est une question de goût. La sauce Chimichurri, une émulsion à base d’huile d’olive, persil, origan, ail, piment rouge et vinaigre, changeait des sauces européennes crémées et était agréablement parfumée. Un excellent mariage avec la viande de bœuf. Les « Papas Fritas », frites à la façon de la maison, étaient croustillantes et moelleuses, épaisses et délicieuses avec une pointe de gros sel. Cette assiette m’a plus aussi par sa légèreté et le filet pur était assez maigre pour ne laisser aucune trace de lourdeur… un petit bonheur argentin, quoi !
L’appétit de Miguel étant plus important que le mien, il a choisi une entrecôte de 300 grammes (26,80 €), mais il aurait pu la demander de 400 gr (32,20 €) puisqu’on vous la propose dans les deux « formats », si j’ose dire. Une idée intelligente, qui permet d’éviter un stupide gaspillage et d’assurer aussi une très grosse faim. La saveur est corsée et de caractère, ce n’est pas une viande rouge « transparente » (insipide ou quasi) en bouche. C’est sans doute ce qui fait la réputation du bœuf argentin dans le monde entier : sa « griffe » gustative. Personnellement, je serais curieux de goûter une de ces viandes, maturée à environ trente-cinq jours ! L’entrecôte est cuite parfaitement pour Miguel et il se régale autant des « frites » maison que moi. Sa viande est accompagnée d’une sauce Criolla : émulsion à base de tomate, poivron rouge et vert, oignon, coriandre, ail, vinaigre et huile d’olive.
Dessert et pousse café maison…
Côté dessert, une superbe crème brûlée (7,80 €) pour Miguel. Généreusement servie dans un ramequin de belle taille, la consistance est impeccable, ferme et crémeuse à la fois, parfumée sans être écœurante (ce qui arrive assez souvent) et la « croûte » brûlée, croustillante à souhait. Tout ce que j’aime ! Mais je n’en ai pas trop volé… De mon côté j’ai choisi, comme je le fais souvent pour avoir un regard sur les desserts de la maison, un beau café gourmand (12,50 €). Une mousse au chocolat noir digne de celle de mon grand-père Maitre Queux et pâtissier, ferme et forte en chocolat, parsemée de copeaux blancs et au lait. Un sablé rond, fondant comme un sucre d’orge et fourré d’une pâte chocolatée… un délice ! Un mini sabayon froid aux fraises, léger et savoureux, même si les fraises d’hiver n’ont pas la douceur de celles de saison. En tout cas, pas de fruits surgelés ici. Et enfin, un second sablé enrobé d’un glaçage au chocolat. Bref… un ensemble très gourmand et accompagné d’un café argentin bien corsé, tout ce que j’apprécie. Pour une autre table, j’ai vu Léonardo amener un sabayon fraîchement monté et j’ai demandé à goûter… j’ai presque regretté mon choix de dessert. Et pour clôturer ce repas argentin très réussi, Carlos est allé nous chercher une bouteille de Pisco qu’il a traficoté à sa façon… c’était vraiment top ! Un digestif dont il garde le secret, mais nous avions déjà compris qu’il était une sorte d’alchimiste-sorcier des boissons, qui sont sa passion.
Nous avons finalement quitté le Nueva Buenos Aires assez tard dans la soirée, après un dîner exotique qui nous a permis de découvrir de nouvelles saveurs, mais aussi marqué par la gentillesse. Et ce n’est pas ce qui concourt le moins à une bonne soirée… Lors de notre prochaine visite, nous espérons bien rencontrer la maîtresse des lieux car si elle est aussi adorable que son mari, nous passerons encore un excellent moment ! Si vous aimez la convivialité, un service aux petits oignons et sincèrement souriant, les produits frais de qualité et les portions généreuses, nous ne pouvons que vous conseiller de faire rapidement un petit tour au cœur de l’Argentine de Léonardo et de la gentillesse de Carlos. Vous ne pouvez qu’y passer un moment de qualité… à tous points de vue.
Notation Clic Infos : 4 Marcus
(1 = moyen – 2 = correct – 3 = Table de qualité – 4 = table de grande qualité – 5 = Table d’exception).
Site officiel : www.nuevabuenosaires.be