Une table grecque qui décoiffe la tradition : Koyzina Authentica.

J’ai de délicieux souvenirs en Grèce, de restos sympas en bord de mer ou au cœur de jolis villages, ainsi que de plats traditionnels un peu lourds. J’avoue donc que lorsque qu’on m’a proposé de visiter ce restaurant, j’y suis allé un peu « à reculons ». Mais dès la porte d’entrée franchie, j’ai été surpris par une ambiance qui n’a rien de faussement grec comme souvent, par la chaleur et l’élégance des lieux, mais surtout… par la qualité de la table au savant mélange de tradition et d’inventivité. J’y retournerai, c’est certain et vous pouvez y aller les yeux fermés. Amateurs de plats gras et seulement roboratifs fuyiez, car cet endroit n’est pas pour vous ! Par contre, si vous aimez la finesse, les surprises gustatives, la modernité mâtinée de tradition et la gentillesse de l’accueil, vous trouverez tout ce que vous cherchez. Table grecque oui, mais intelligemment réinventée.

Une élégance efficace et une chaleur qui met les sens en appétit.

Généralement, il faut bien le reconnaître, qui dit restaurant grec dans une grande ville hors des frontières hellènes, dit déco outrageusement bleue, drapeaux partout, filets de pêche, bibelots à touristes et plein de photos d’îles et de moulins à vent… Eh bien, dès que vous serez face au restaurant, sur la bruyante avenue Brugmann, vous n’aurez plus qu’une envie : pénétrer ce petit univers qui vient directement vous chuchoter à l’oreille d’y entrer. La façade est rieuse, un peu shabby chic, colorée. Une petite terrasse semble l’isoler du reste du monde, alors que vous avez dans le dos les bruits d’une circulation bien réelle. Une fois la porte ouverte, vous entrez dans un petit hall et découvrez des escaliers pleins de petites lanternes, qui donnent juste envie d’y revenir un soir. Il y a un petit comptoir d’accueil et vous avez l’impression d’être dans un Bed and Breakfast chaleureux. Avant la salle principale, vous en découvrez une autre, plus petite et qui peut accueillir une dizaine de personnes. Il y a là des bibliothèques croulant sous les bouquins, une étagère qui propose des produits régionaux grecs de qualité (épices, condiments, huile d’olive…) et face à la grande fenêtre, une tablette de bois où vous avez juste l’envie de déposer une tasse de café et de plonger dans un bon livre, pour le reste de la journée. La salle de restaurant est élégante, les nappages colorés et les tables bien dressées. Seules deux grandes colonnes évoquent un peu les temples grecs et on est loin des gargotes où on casse des assiettes, en buvant du Retsina et en dévorant des petits os sur du Sirtaki. Je me suis tout de suite dit que j’allais faire ici d’agréables découvertes et j’ai même cru, un instant seulement, que l’endroit n’avait de grec que le nom… Mais que nenni. En tout cas, j’avais hâte de m’asseoir et de plonger dans la carte, accompagné de Murielle Malalel, toujours élégante et à la tête de l’agence Azerty Press & PR. Sachant exactement où elle m’avait emmené, je lui trouvai l’œil goguenard et un sourire entendu, du genre : tu n’aimes pas le grec, mais attends mon gaillard, tu vas voir ce que tu vas voir… Et j’ai vu.

Dès les amuse-bouche, on atterrit à Athènes et le voyage commence.

Un élégant plat allongé nous propose une superbe huile d’olive, au fond de laquelle se cache une sorte de caramel rougissant. La petite salade de tomates et jeunes oignons est parfumée. Les olives sont simplement magnifiques et me font penser aux quinze minable fruits verts qui pendent aux oliviers de mon jardin, que je chouchoute amoureusement. Je suis jaloux… et c’est délicieux ! De bon augure surtout, puisque le vin que j’ai commandé arrive tout frais sur la table et il n’a rien de ce goût de Retsina dont je ne suis vraiment pas fan. C’est un petit blanc sec, fruité et maritime (précision qu’on m’a donnée) et en fait, j’ai presque le vent de la côte dans la bouche. Agréablement étonnant… C’est un Savatiano de la maison Papagiannakou, au prix raisonnable de 30 € et disponible aussi en demi bouteille. Le pain est craquant et artisanal, ce qui ne gâche rien. Il se marie à merveille avec l’huile d’olive caramélisée… on s’en gaverait, mais ce serait dommage.

Des entrées savoureuses, dont une véritable merveille.

En entrée, nous avons choisi d’en partager quatre car la carte, restreinte et donc rassurante, provoque de vraies envies. Le Taramosalata, un onctueux velouté de tarama blanc (100% crème et œufs de cabillaud fumé) au parfum d’agrumes, n’a rien à voir avec la pâte rose et un peu écœurante qu’on achète en magasin. C’est tellement léger qu’a deux nous avons fini l’assiette (9€).  La féta frite en croûte de sésames noir et blanc, accompagnée d’un léger sirop de confiture et de quelques feuilles de roquettes est surprenante (11€). Non seulement cela fait une assiette élégante, mais c’est croustillant et onctueux à la fois. La douceur de l’ensemble est rendue pétillante par la légère amertume de la roquette fraîche… une vraie découverte quand on ne connaît que la féta à l’état froid, en cubes et jetée sur une salade verte ou de tomates ! Une belle trouvaille encore… et quand je parlais d’identité grecque intelligemment revisitée, voici un exemple parfait. Je ne pouvais ignorer à la carte les calamars croustillants, qui me tendaient les tentacules… surtout accompagnés d’une salade de fenouil et d’une petite sauce magique à base d’huile d’olive extra vierge, de citron, de quelques herbes et sûrement d’une pincée de poudre de perlimpinpin (14 €). Croustillants à souhait, sans une once de gras visible, la cuisson était parfaite (ni trop ni trop peu) et le fenouil apportait la fraîcheur et le petit goût anisé que j’attendais Mais, comme dans la chanson de Jeanetton qui prend sa faucille et rencontre quatre jeunes et beaux garçons… ici, c’était la quatrième assiette l’intrépide. La Fava de Santorini, servie avec maquereau fumé et tomates cerises confites (9,50 €) est tout simplement renversante… la fève de Santorin est une sorte de pois cassé jaune, longuement cuit et réduit en très fine purée, montée à l’huile d’olive. C’est tout simplement le cousin élégant des villes du Houmous de la campagne ! En clair, pour moi qui aime pourtant la traditionnelle purée de pois chiches, ce fut une explosion savoureuse en bouche. C’est d’une grande finesse et le maquereau fumé, débité en petits morceaux, apporte une agréable mâche en plus de son caractère fumé et de son goût marqué. Accompagnée de tomates cerises légèrement confites, cette entrée est d’une grande élégance et sans doute l’une des meilleures que j’aie découvertes ces derniers temps.

Les plats sont simplement savoureux et la tradition y laisse sa signature.

Comme grosse pièce, Murielle a choisi un plat traditionnel grec : l’agneau. L’assiette est bien présentée, sans extravagance et rappelle une cuisine de famille. C’est sans doute la signature de la maison… On retrouve en effet dans les plats une élégance simple, raffinée et sans fioritures qui ne seraient d’aucune utilité. En l’occurrence, l’agneau est rôti longuement à basse température et servi sur une onctueuse sauce au vin rouge. Il est accompagné de petites pommes de terre sautées au romarin et de purée d’oignons (22,50 €). Un plat savoureux et généreux, ayant toutefois belle allure. Pour ma part, toujours dans ma période poissons, je me suis bien sûr tourné vers un bar en filets (22 €). Le bar très frais est accompagné d’une purée de céleri-rave et citron, sur un fond de crustacés et entouré de quelques légumes croquants, très bien réalisés. La cuisson du filet est parfaite, il est fondant et la peau croustillante, tout le plaisir d’un bon plat de poisson ! Quelques fines lamelles de légumes frits apportent un croquant qui m’a ravi le palais. Des plats efficaces et des portions généreuses, qui raviront jusqu’aux grands appétits.

Un dessert qui fut une découverte et pourrait bien être addictif…

On me surprend rarement avec un dessert, surtout si on parle de glace… Et là encore, j’ai été cueilli. Pour Murielle ce fut un gâteau d’orange (7 €). Là, c’est assez difficile de surprendre… mais quand c’est bien réalisé, c’est une volupté sucrée qui finit parfaitement un déjeuner. Moelleux et frais, imbibé du parfum de l’orange et fondant, c’est un dessert qui n’alourdit pas la fin du repas et tout simplement délicieux. Comme j’aime les paradoxes, j’ai choisi le seul dessert glacé à la carte et ne regrette pas mon choix. Rien que l’intitulé est une invitation au voyage et je voulais terminer le mien de belle manière : glace tahini, halva, figues sèches et abricots secs, sur un fond de soupe de chocolat (8 €). Taratata, je vous entends d’ici : « mais ça doit être lourd ». Pas du tout… que du contraire ! C’est assez léger et côté papilles, vous allez de découverte en surprise. Comment décrire cela ? La glace est réalisée à base de crème entière bien sûr, mais aussi de tahini (crème de sésame), ce qui donne un dessert proche des parfums de beurre de cacahuète et de caramel. Il y a aussi une saveur intense de torréfaction et cela donne une crème glacée surprenante, très douce sans être écœurante et avec une étonnante mâche, sans doute due à l’agglomération indomptée du tahini. En clair, j’ai été secoué par ce dessert et très logiquement, je me suis précipité sur un bon expresso, pour conclure ce déjeuner comme il se doit.

Le Koyzina Athentica est donc un restaurant grec hors sentiers battus, élégant et à la table intéressante. Il allie harmonieusement les traditions d’une cuisine grecque très identifiée à une modernité de bon aloi, sans chichi et efficace. La décoration est élégante, colorée, chaleureuse. J’y ai déjeuné et je suis convaincu qu’y dîner doit être une manière différente de découvrir l’endroit, grâce aux éclairages doux. Une belle découverte à Bruxelles. Attention, Uccle n’est pas facile d’accès en journée… prévoyez donc du temps pour les embouteillages, si vous venez du centre ou du nord de la ville.

Notation : 4 Marcus
(1 = moyen – 2 = correct – 3 = Table de qualité – 4 = table de grande qualité – 5 = Table d’exception).

Site officiel : www.greek-restaurant-koyzina-brussels.be

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